« La louange exprime parfaitement le salut et la liberté. Elle est le contraire de l’envie ; elle illustre que le bien est communicatif. »Paul Beauchamp
Voici un article écrit par Paul Beauchamp dans son ouvrage Psaumes Nuit et Jour, qui illustre cette pensée que la louange conduit à la liberté, implique la liberté.
« Louange » est un mot qui ne vient pas tous les jours dans notre bouche. « Félicitations » est d’un usage beaucoup plus courant. De même « Action de grâces » traduit en langage d’Eglise ce qu’on exprime d’ordinaire en disant « merci ».
« Louange » et « action de grâces » ne signifient pas tout à fait la même chose. La différence consiste en ceci : on fait la louange d’un bien même si ce bien n’est pas à nous (« Félicitations ! ») ; on remercie pour un bien qui est à nous parce que nous l’avons reçu (« merci ! »). Je loue pour un bine accordé aux autres (que j’en sois ou non bénéficiaire) ; je remercie pour un bien qui me vient d’un autre. Les parents rendent grâce à Dieu pour une naissance ; leurs amis les en félicitent, leur en font « compliment », louange.
Des deux côtés – louange et action de grâces – il s’agit de sortir de soi.
Louange et remerciement sont nécessairement au coeur de la prière, parce qu’il faut sortir de soi pour prier.
Nous partageons le salut avec d’autres et nous le recevons d’un autre. L’homme sauvé va donc louer pour le salut qu’il partage et remercier pour le salut qu’il reçoit. On reconnaît l’homme sauvé à sa louange et son action de grâces.
Louange et remerciement sont l’expression parfaite du salut. Le mal est prison et le salut délivrance. L’envie est le gardien de cette prison. Elle consiste à s’attrister d’un bien si d’autres le possèdent, à se réjouir d’un bien à condition de pouvoir en jouir seul. Le dispositif de la liberté est construit à l’inverse : la louange se réjouit d’un bien dont profitent les autres. Le remerciement reconnaît dans un bien le don qui provient d’un autre. Voilà pourquoi plus de la moitié des Psaumes sont louange ou action de grâces.
[…]Les Psaumes parlent souvent de louer le Seigneur « toujours et partout ». On insiste quelquefois sur « toujours » :
Que sans fin, Seigneur mon Dieu, je te rende grâce ! Ps 30, 13
Je bénirai le Seigneur en tout temps,
sa louange sans cesse à mes lèvres Ps 34, 2
Quelquefois aussi, ou en même temps, c’est l’étendue, nombre des frères ou immensité de l’espace, qui est évoquée :
Magnifiez avec moi le Seigneur,
exaltons tous ensemble son nom. Ps 34, 4
Ceux qui convient à la louange peuvent être tout Israël et ceux qui sont conviés, toutes les nations. Israël remplit alors son rôle de témoin :
Louez le Seigneur, tous les peuples ;
fêtez-le, tous les pays !
Son amour envers nous s’est montré le plus fort ;
éternelle est la fidélité du Seigneur Ps 117
Quand un seul témoin invite à la louange, il représente un apôtre. Quand tout un peuple invite à la louange, il représente tout l’Eglise, qui communique sa joyeuse nouvelle à toutes les nations du monde. Le psaume 117 signifie pour nous qu’Israël rend grâces du bienfait qu’il a reçu en Jésus-Christ, pour que les autres louent Dieu de ce bienfait à leur tour. Annoncer le bienfait qu’on a soi-même reçu, c’est souhaiter que les autres le reçoivent et renoncer à l’envie. Se réjouir du bienfait reçu par les autres, c’est se rendre capable de le recevoir soi-même. …
Psaumes Nuit et Jour Ed du Seuil 1980
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